Archives mensuelles : août 2016

Petit conte malécite en attendant que l’eau revienne

Comme les étés précédents, cet été est chaud et sec.
La nature est en souffrance, les branches fanent, les arbres meurent, les rivières se traversent à pied, la terre se lézarde. La vision de la nature assoiffée est affligeante.
On peut interroger le ciel : il est d’un bleu imperturbable. Août n’a pas apporté de pluie. Pas plus que juillet ni juin.

Alors, je vous propose cette péripétie mythique, d’origine malécite, tirée du livre « Contes des Indiens d’Amérique du Nord », de Stith Thompson (traduction Bertrand Fillaudeau), Éditions José Corti (2012).
Les Malécites se nomment eux-mêmes les Wolastoqiyiks, ce qui signifie le « peuple du fleuve Saint-Jean » ou les « Amérindiens du fleuve Saint-Jean ». L’étymologie populaire donne la définition de « belle rivière » à la racine Wolastoq » (Wikipédia).

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L’eau emprisonnée

Aglabem retenait toute l’eau du monde ; les rivières s’arrêtèrent donc de couler, et les lacs s’asséchèrent, et tous et partout commencèrent à mourir de faim. En dernier ressort, ils lui déléguèrent un messager pour le prier de donner de l’eau au gens. Aglabem refusa et il n’offrit à l’émissaire qu’un seul verre de l’eau qu’il utilisait pour se laver. Ce n’était pas suffisant pour étancher la soif d’un seul. Les gens commencèrent alors à se lamenter, certains constatant « Je suis aussi sec qu’un poisson », « Je suis aussi sec qu’une grenouille », « Je suis aussi sec qu’une tortue », « Je suis aussi sec qu’un castor », et autres phrases du même tonneau, car ils étaient tous sur le point de mourir de soif.

Enfin un grand homme fut envoyé à Aglabem pour le supplier de relâcher de l’eau pour les gens. Aglabem refusa, soutenant qu’il en avait besoin pour s’y étendre. Alors, l’émissaire abattit un arbre, pour qu’il tombe sur le monstre et le tue.

Le tronc de cet arbre devint la rivière principale (Wolastoq, ou fleuve Saint-Jean) tandis que les branches en furent les affluents, et que les feuilles se transformèrent en mares en amont de ces ruisseaux.
Comme les eaux s’écoulaient de nouveau vers les villages et leurs habitants, ceux-ci s’y plongèrent pour boire et furent métamorphosés en animaux, ou plutôt en l’animal auquel chacun s’était comparé autrefois en se plaignant de la soif.

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En attendant que l’eau revienne, faites bien attention à ce que vous direz…

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